Esprits... Nous vous aiderons...

Un filet de bave s'écrasa sur sa joue. Ossiria exprima une moue de dégoût. C'était visqueux, c'était sale. Son cou était serré de plus en plus. L'air lui manquait. Les doigts se refermaient sur ses veines dans lesquelles le sang et l'oxygène se rarifiaient. Des mouvements de défense. Des mouvements vains. La queue fouettant le sol. Les sabots y traçant des sillons. Les jambes battant l'air. Les bras tentant de faire se relâcher l'emprise. Mais rien à faire.
"Vais-je mourir ?", pensa-t-elle.

L'horizon devenait flou. Seuls les yeux rouges de son ennemi restaient encore visibles. Pleins de rage, pleins d'une haine. Cet être avait tant de mal en lui. Et pourtant, Ossiria ne lui en voulait pas. Elle avait été imprudente, elle s'était aventurée un peu trop loin vers le Nord. Depuis quelques temps déjà, son amour et sa confiance en Avalon avaient retrouvé de la vigueur. La guerrière se sentait proche de sa terre d'adoption. Elle avait cru pouvoir percer quelques secrets sans craindre le moindre retour de bâton. Mais l'île mystérieuse ne semblait pas prête à dévoiler tous ses secrets.
Ses épées étaient loin. Echouées parmi les rocailles, elles reluisaient au soleil, envoyant de vibrants reflets. Impossible de les rattraper... Impossible de...

Partout, un Equilibre existait. Les Esprits veillaient à cet Equilibre. Certains étaient bons, d'autres moins, d'autres encore s'adaptaient selon les situations. Des querelles les animaient, des guerres les secouaient parfois. Tous le savaient sur les Terres. Mais ceci ne les concernait guère.

La pression sur sa gorge était trop forte. L'orc sauvage qu'elle avait dérangé en plein festin, penché sur la carcasse d'une proie sans vie, n'avait pas apprécié son intrusion. Le cri d'Eneï, strident, raisonna tandis que Ossiria sombrait dans le néant.



Un être la fixait. d'apparence humaine au premier abord, ses grands yeux, son attitude, ses détails, laissaient place au doute. Il se penchait sur la centaure, un sourire aux lèvres. La créature n'inspirait ni confiance, ni défiance. Rien n'émanait d'elle.
"Qui... ?"

L'air revînt soudain. L'être s'effaça. Les poumons de la guerrière retrouvèrent leur souffle dans la douleur. L'orc avait relâché la pression. Ses yeux semblèrent se perdre dans l'infini tandis qu'il s'affalait sur Ossiria.

Le felys s'était aventuré dans un champs à l'extérieur du village. Cela faisait assez longtemps maintenant qu'il était ici pour laisser ses pas fouler les espaces qui lui étaient encore inconnus.
Allongé sur l'herbe la tête dans ses mains et le regard perdu dans le ciel, il venait de rentré d'un entrainement sur le champs de bataille de l'île et profitait de l'air frais de la fin de journée pour se reposer un peu.

Le chant des oiseaux était plaisant et le souffle de la brise venait caresser les cheveux en bataille du rôdeur qui s'assoupissait presque de bien être. Il tourna la tête légèrement sur le côté droit et aperçut au loin un éclat de lumière venant d'un épaise forêt qui semblait délimiter les frontières de l'île des Anciens.

C'est un endroit de l'île qu'il ne connaissait que très peu. Il ne s'était jamais aventuré au delà d'un certaine limite d'Avalon et ce lieu lui semblait très lointain pour s'y aventurer seul...
Cependant, en cette fin d'après midi, il sentait qu'il devait explorer cette partie encore vierge de l'île, de plus les reflets de lumière venant de cette direction semblaient indiquer que quelqu'un s'y trouvait surement...

Il se releva et marcha en direction du nord...Plus il s'avançait dans la forêt et plus l'épais feuillage des arbres cachaient le ciel et obscurissait les environs. Guidé par cette lueur qui se faisait de plus en plus persistante, Neoz dégagea les branches gênantes d'un coup de griffes exotiques pour se frayer un chemin.

Encore quelques pas et il arrivait à la hauteur de ce reflet...Il était provoquer par une lame planté à même le sol, en s'approchant de plus près il la reconnue, c'était celle d'Ossiria...

*Ossi...*

Non loin le rôdeur vu enfin la jeune centaure, prise à la gorge par une créature des plus malfaisante. Sans tarder un instant de plus et par reflex, celui ci décocha son arc et vint y placer une flêche qui vint se planter avec force contre l'épaule de l'agresseur, qui tomba violemment au sol... assomé. La guerrière était à présent libre de ses mouvement mais resta au sol un moment, choquée par l'évènement.
Neoz courut vers elle pour s'assurer de son état tout en gardant un oeil sur l'étrange créature qui gisait sur l'herbe au pied d'un arbre centenaire.

Les feuilles d'un vert clair se balançaient sous la brise. Les arbres lui parurent beaux, si beaux. Leurs couleurs étaient magnifiées par le noir d'où ressortait la centaure. Elle resta allongée sur le sol un moment, hocquetante. Le visage de la créature, ses yeux lumineux, la hantaient. Ossiria ne pouvait se défaire de cette image. Encore hébétée, elle releva la tête puis s'appuya sur les paumes de ses mains, des mèches dans les yeux. La tête lui tournait, mais elle parvenait peu à peu à retrouver son équilibre. Son regard se leva peu à peu en direction de la personne qui l'avait sauvée.

"Neoz...", murmura-t-elle avant de se perdre dans ses esprits. Un pâle sourire se dessina sur son visage tandis qu'elle se relevait avec précaution. "Je crois que je te dois la vie", dit-elle avec un petit rire nerveux tout en se frottant le front, "Il faudra que je veille à payer ma dette."

L'orc gisait à sa gauche, au pied d'un arbre au tronc énorme et à l'écorce noueuse. Il était sonné mais respirait encore. Un gros son rauque en donnait la preuve.

"Il vit encore...", maugréa la guerrière sur un ton décontenancé, "Il semblerait que tu ne sois pas si infaillible que cela, cher Neoz", claironna-t-elle en faisant un clin d'oeil malin en direction du félys.

Elle ramassa ses lames. Elles n'étaient pas émoussées, c'était une chance. Leur solidité était digne de la renommée du forgeron qui les avait forgées. Ossiria s'approcha de son ennemi et leva ses armes. Quelques oiseaux s'envolèrent de leurs nids en piaillant, réagissant à son geste brusque.

"Bien ! Finissons-en !"

Affalée de tout son long dans l'herbe verte de la clairière, à plat ventre, Demosthenia dessinait.
Celà faisait un bon moment maintenant qu'elle s'évertuait à reproduire le champignon qu'elle avait en face des yeux.
Il ressemblait exactement à celui qu'elle avait vu dans l'un des livres de la bibilothèque et voulait absolument le reproduire sur son petit calepin pour pouvoir le comparer.
Si c'était bien ce champignon là alors les vertus qu'il renfermait en lui pourait lui être bien utile dans l'élaboration de futures potions magiques. Au pire il servirait de diner ... un bon velouté de champignon n'était pas mauvais.

Les sourcils froncés et concentrée comme jamais, elle fut tirée de cet état par une plume qui tombait du ciel et qui vint se poser sur son crayon.
Une petite plume ...
Machinalement elle leva la tête au ciel et apercu Eneï, la chouette de son amie Ossiria.

"Eneï ?!?! ..." s'intérogea-t-elle.
"Et sans Ossi ?!?!"

La chouette volait à vive allure en direction du nord de la forêt toute proche.
Intriguée, la sorcière se releva vivement et, sans lacher la chouette des yeux, décida de la suivre, laissant là son champignon et son calepin à même le sol.
Il était étrange que son amie était sans sa chouette fétiche et elle fut encore plus inquiètée par le cri strident poussé à l'instant par l'animal.

Elle arriva rapidement à la lisière de la foret et fut surprise par une nuée d'oiseau qui s'échappaient de l'endroit comme apeurés.

Quelquechose ne va pas ....

Ecartant les branchages sur son passge, elle se fraya un chemin à travers la foret qu'elle connaissait par coeur.
Au bout de quelques minutes, elle déboucha à l'endroit où avait atteri la chouette.

Comme elle le pensait Ossiria était là. Debout, la tête haute et le regard froid au dessus d'une masse inerte à terre. Ses lames étaient en l'air, prêtes à faire passer un sale quart d'heure à la victime au sol.

L'elfe sorti précipitemment du feuillage et interpella son amie ...

"Ossi ?!?!?!"
Non !!!
Que se passe-t-il ???
Tout va bien ???"

L'elfe accourait déjà précipitemment vers la centaure, sans regarder autour d'elle et sans faire attention aux éventuels dangers de la foret.

Les épées de la guerrière au dessus de sa tête, l'orc avait le visage livide. L'heure de la mort avait frappé pour lui. Le soleil qui se reflétait sur les lames l'éblouissait presque à en cligner les yeux. Il ne verrait surement pas l'expression de la centaure juste avant qu'elle ne prenne sa vie.

Cependant Neoz savait qu'ils pouvaient peut être tirer avantage à sa capture plutôt qu'a l'égorger comme un vulgaire animal. Il était sur le point de retenir le geste d'Ossiria quand il sentit derrière lui des pas presque félins se diriger vers eux.

Lorsqu'il tourna la tête, il aperçut l'elfe qui avait envouté son coeur et son esprit, la ravissante Demosthenia. Un bref sourire vint se dessiner sur ses lèvres, puis soudain son oeil devint perçant...
D'un geste il s'avança vers sa promise qui courait à en perdre haleine, et dans le même geste décocha une flèche qui passa à quelques centimètres de son épaule pour aller se figer dans le torse d'un griffon qui la poursuivait !

Ne te précipite jamais puce...prend toujours garde à se qui t'entoure ! Lui dit il en un clin d'oeil.

Puis lui prenant la main il s'avancèrent sur Ossiria qui avait retenu l'espace d'un instant son geste meurtrier, juste le temps pour que le felys lève son arc et empêche les épées de continuer leur course contre l'orc...

Attend un moment encore chère Ossi...
Je pense que l'on peux tirer parti du fait qu'il soit encore vivant pour le questionner. C'est d'ailleurs dans ce but que je ne lui ai pas porté de coup fatal !

Des appels. Une voix. Celle de Demosthenia.
Ossiria regardait froidement l'orc. Il avait réussi à la destabiliser. Elle avait été faible face à lui. Une rage contenue, la prenant aux tripes, guidait à présent ses gestes. Les lames vibrèrent, le sang s'apprêtait à innonder le chemin.
Le sifflement d'une flèche fichée dans les chairs stoppa net la centaure. L'orc avait encore un sursis. Ossiria détourna la tête. Là, derrière son amie, un griffon s'écrasait au sol dans un nuage de poussière, terrassé par Neoz. Instinctivement, l'une de ses épées tînt en respect l'orc tandis que la seconde décrivit une courbe en direction de ses compagnons, comme pour prévoir la surprise d'une quelconque attaque.
Elle écouta les sages paroles du rôdeur avant de jetter un regard à l'orc. Il faisait grise mine, c'était le moins que l'on put dire. Une grimace déformait la peau verdâtre de son visage. Les sourcils froncés, le front soulignant une douleur et une certaine peur à la vue de l'ombre de la Mort se prolifant, il inspirait la pitié.
Ossiria réalisa soudain la lâcheté de son acte. Elle était loin d'être noble dans cette situation. Elle laissait la haine et l'angoisse commander à son coeur sans laisser place à sa raison et à son humanité. La rage passa et ses yeux s'éclairèrent. Le déshonneur n'était pas dans le fait d'avoir trouvé adversaire plus fort, il était dans le fait de ne pas l'avoir accepté.
La guerrière soupira puis fit quelques pas en arrière. Elle rengaina ses lames, les faisant tinter, gardant un oeil sur l'orc, se faisant la plus dissuadante possible.

"Comme il te plaira, Neoz..."

Elle sourit en direction de l'elfe et la salua. Un frôlement sur son épaule annonça la venue d'Eneï. Le rapace se percha sur la centaure et soupira.

"D'où revins-tu toi ?", l'interrogea Ossiria. Elle caressa les plumes neigeuses tout en demandant : "Bien... Comment procédons-nous alors ?"